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Escapade en péninsule indochinoise – le Sud du Vietnam | 2015-05-04 |
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Ça y est. C’est déjà l’heure de quitter le Cambodge. Après une grosse semaine en territoire khmer, on commençait à s’y faire. Avec un petit pincement au cœur et une appréhension de l’inconnu, nous voilà embarqués vers une autre contrée : le Vietnam, du sud au nord.
Passage de la frontière
Il existe plusieurs moyens de rejoindre le Vietnam en partant de la capitale cambodgienne. Nous avons opté pour un trajet en bus jusqu’à Ho Chi Minh City, puis un deuxième le lendemain jusqu’à Can Tho, une ville située en plein cœur du delta du Mékong, connue pour ses marchés flottants. Habitués aux longs trajets en bus qui nous ont permis de sillonner une très grande partie du Cambodge, nous pensions que ces derniers n’allaient être qu’une simple formalité. Cependant, c’est une tout autre facette de l’histoire que nous avons découverte. Soucieux que je suis, j’ai pris le soin de parcourir les dizaines de retours d’expérience sur la meilleure compagnie (la moins pire plutôt) qui nous permettrait de se rendre au Vietnam sans trop de pépins. Il s’avère que les bus Mékong Express, reconnaissables par leur robe orange et blanche, proposaient des tarifs largement abordables et surtout un service de qualité. On embarque, jusque-là tout va bien. Les trois premières heures jusqu’à la frontière se passent normalement. Ils nous laissent une pause de vingt minutes pour manger. Je me décide de prendre une soupe de nouilles khmère très locale car j’aime le risque (en fait, j’avais faim et le risque de tomber malade était faible). Nous passons sans problème la sortie de la frontière côté Cambodge avec une simple prise de nos empreintes digitales et un tampon de sortie. En une demi-heure c’était plié. Sauf que…
La frontière vietnamienne. Toute une histoire. Nous sommes perdus au milieu de nulle part, une aberration administrative qui nous fait comprendre qu’on est sortis d’un pays mais qu’on n’est pas entré dans un autre, pris en otage en quelque sorte. Le guide de la compagnie de bus nous indique que la durée d’attente pour passer la frontière est estimée à entre trente et soixante minutes. Motivés, nous restons dans la file d’attente, comme tout Européen le ferait, sacs sur le dos. Puis les minutes passent. Les dizaines de minutes. Une heure. D’autres bus passent. Le seul agent de l’immigration voit des piles de passeports s’entasser devant lui. De temps en temps, des locaux se « trompent » de file, viennent dans la nôtre, et passent quand même devant tout le monde. Les autres piles de passeports des bus d’à côté passent aussi devant nous. Bref, nous sommes passés en dernier, au bout de deux heures ! Deux heures pour faire dix mètres. Le guide nous a avoué que l’agent de l’immigration lui a fait comprendre qu’il n’avait pas mis assez de billets pour faire passer son bus avant les autres.
Le reste du trajet se passe sans encombre. Nous voyons déjà la différence entre le Cambodge et le Vietnam : les maisons font moins pauvres, il y a beaucoup plus d’affiches publicitaires, plus d’immeubles. Puis arrive Ho Chi Minh City, une énorme ville qui ressemble comme deux gouttes d’eau à nos très grosses agglomérations. Totalement rien à voir avec ce qu’on a pu voir au Cambodge. On ne se déplace plus en tuk tuk mais en taxi, climatisés. Le grand luxe mais qui perd de son charme.
Premier contact avec les bus du Vietnam
Après ces longs trajets de bus depuis le début du voyage, et comme c’était quand même les vacances, nous avons choisi de bien nous reposer dans un hôtel « de luxe ». Le ventre vide et ne connaissant pas la ville, nous avons préféré profiter du service de restauration de l’hôtel au 14e étage, avec vue panoramique sur les gratte-ciel. Nous avons aussi réservé un aller en bus pour le lendemain, à destination de Can Tho, et un retour le surlendemain. L’hôtel sous-traitait ce service à une agence de voyage qui pratiquait des prix relativement chers (le prix du « luxe »). Je suis prêt à payer le prix quand je ne me tracasse pas ensuite. Ils nous disent qu’ils nous prennent entièrement en charge de l’hôtel à Ho Chi Minh City jusqu’à l’hôtel de Can Tho. Pareil au retour. Super, allons-y.
Le lendemain matin, le rendez-vous est fixé dans le hall de l’hôtel. L’hôtesse de l’agence de voyage nous confirme que notre transport va arriver. Puis vient un taxi. C’est la première fois qu’un taxi d’une compagnie classique vient nous chercher. D’habitude, c’était plutôt des navettes de la compagnie de bus. Le taxi nous dépose à l’agence de voyage où nous attend une autre hôtesse, qui nous fait monter dans un deuxième taxi. On commence à être un peu largués. On devait aussi recevoir un numéro de téléphone à appeler pour confirmer le point de rendez-vous du lendemain, sauf qu’elle ne nous l’a jamais donné. Elle nous a déposé sur le bord de la route en nous disant de monter dans ce minibus, plein à craquer, où tout le monde nous regardait droit dans les yeux. N’ayant pas le numéro de téléphone qu’on m’avait promis et ne voyant pas de place pour mettre mon gros sac à dos, ni celui de ma chérie, je me retourne, hésitant, vers l’hôtesse pour lui demander. A mi-chemin dans mon demi-tour et ma confusion, j’entends une voix nasillarde et autoritaire qui m’engueule copieusement. Je me résigne donc à laisser tomber mon sac dans les bras de ce brave homme et m’engouffre le plus vite possible au fond du minibus, très surpris par ce qui venait de m’arriver.
À peine installés, un couple de français nous a remarqués. Témoins de la scène, ce fut un bon prétexte pour entamer la discussion. Ils se rendent justement au même endroit que nous. Le minibus s’arrête et nous dépose dans le tumulte de la gare routière de l’Ouest. Une personne crie dans un micro en vietnamien. Les gens forment des flux qui vont dans tous les sens. Une longue ligne de bus se présente pour un départ chaque minute. Sur place, un guide nous indique notre bus. Après deux taxis, un minibus et une engueulade, c’est bon, on y est. Enfin, dans le bus pour aller à Can Tho, pas encore à l’hôtel.
À Can Tho, la gare routière est plus petite mais tout aussi bruyante et incompréhensible pour les occidentaux. L’hôtesse de l’agence de voyage de l’hôtel d’Ho Chi Minh City nous avait indiqué qu’une navette gratuite était disponible pour nous transporter au pied de notre hôtel. Une fois sur place, nous n’avons vu que des taxis, des bus et une gare. Pas de navette apparente. Totalement perdus, nous nous sommes donc rendus tant bien que mal à l’accueil de la gare pour avoir plus d’informations. L’agent d’accueil s’est levée de sa chaise, est passée devant le comptoir et nous a indiqué un minibus dans lequel nous devions monter, puis elle est repartie à sa place. Au moment de monter dans le minibus, le chauffeur, qui était juste à côté de nous, a fermé énergiquement la grande porte coulissante, nous laissant sur le bas-côté, totalement hébétés. On revient donc à l’accueil, surpris et un peu énervés intérieurement, pour leur demander qu’est-ce que c’est que ce bordel qu’on vient de vivre. L’agent d’accueil nous revoit, surprise elle aussi, et nous dit d’attendre un quart d’heure maximum. Un deuxième minibus devrait partir avec nous dedans cette fois-ci. Elle nous dit que c’est celui qui hurle en vietnamien dans le micro depuis le début qui viendra nous chercher. C’est très gentil de sa part mais on ne comprend absolument rien du tout de ce qu’il dit. Le stress monte, surtout qu’on commence à avoir faim et qu’on voudrait bien poser nos affaires dans notre chambre d’hôtel et sortir de toute cette agitation. D’un coup, je vois un attroupement de touristes autour de l’annonceur. Je ne me pose pas de questions, j’en ai marre de rester ici, donc je fonce vers eux avec ma compagne. Si bien que nous sommes les premiers dans le bus, puis les premiers arrivés dans notre magnifique hôtel de Can Tho qui fut la surprise agréable de la journée.
Marchés flottants de Can Tho
Tout ce chemin et ces aventures pour se retrouver dans la ville de Can Tho, dans le delta du Mékong. Nous pensions arriver dans un petit village pauvre avec des cabanes sur pilotis, les pieds dans l’eau du fleuve. C’était tout le contraire. Il s’agit d’une ville d’environ 1 200 000 habitants ! Néanmoins, ne vous laissez pas impressionner par ce chiffre. Il n’y a pas beaucoup de voitures, pas beaucoup plus de motos, la ville est relativement calme en journée. De quoi se reposer un peu avant le lever très matinal du lendemain pour aller se balader du côté des marchés flottants. La ville ressemble étrangement aux villes de la côte d’Azur avec leurs petites promenades au bord du fleuve, comparable à la mer Méditerranée, agrémentées de bancs blancs où on peut se poser et profiter de l’ambiance. Le soleil et la chaleur agréable sont toujours au rendez-vous. C’était calme. C’était bien.
Le midi, nous avions déposé nos affaires à l’hôtel et avons fait la connaissance d’une vieille dame qui organisait des balades en barques sur le Mékong pour découvrir les marchés flottants. Nous n’avons eu aucun problème pour faire notre réservation. Elle acceptait même les dollars, chose relativement rare au Vietnam où le Dong règne en maître. Attention aux arnaques en ville. Can Tho est largement connue pour sa proximité avec des marchés flottants, qui en fait une ville très touristique. Par conséquent, une vieille femme se balade dans les rues pour proposer ses services de visite des marchés sur le fleuve. Même si on dit non, elle nous suit en insistant. La meilleure technique est de se poser devant un restaurant et de lire la carte en l’ignorant. Au bout de quelques minutes, elle s’en va d’elle-même, voyant qu’on ne change pas d’avis. D’autres personnes ont rencontré cette femme et ont eu du mal à s’en défaire si on en croit les témoignages sur Internet.
5h30 du matin, c’est l’heure du rendez-vous pour rejoindre les quais bordant le fleuve. Le service de l’hôtel nous a préparé notre petit-déjeuner, prêt à être embarqué. Nous avons choisi de ne pas avoir de guide pour nous accompagner. Même si l’excursion dure de six à sept heures, nous préférions rester seuls pour s’imprégner de l’environnement. Ce n’est pas notre truc d’avoir un guide pour socialiser le temps de la balade et nous raconter toutes sortes d’histoires touristiques. Un conducteur qui ne parle pas anglais, le Mékong, les marchés flottants, le banc en bois de la barque qui aplatit les fesses, rien de tel. Bon, c’est quand même long six heures sur un banc incroyablement dur. Mais c’est une expérience unique à faire dans sa vie. Imaginez le marché de gros de Rungis en région parisienne mais en un peu plus petit et sur l’eau. C’est exactement ça.
Visite d’Ho Chi Minh City
La plus grosse ville du pays se démarque principalement par le nombre affolant de motos et sa circulation quasi ininterrompue. Venant de Paris, ça ne me fait pas peur de traverser en regardant droit dans les yeux des conducteurs pour se frayer un chemin. À Ho Chi Minh City, il suffit de reprendre la même technique et d’y aller progressivement, de croiser un peu les doigts pour que les véhicules ne débordent pas d’un poil pour t’écraser, et le tour est joué ! Sinon, on ne passe jamais. L’espace autour de nous, que j’appelle la zone de confort, est beaucoup moins large au Vietnam. Un véhicule peut passer à trente centimètres de nous tout en contrôlant la situation. En Europe, si une voiture passe à cette distance de nous, on frôle la crise cardiaque. Nous étions déjà habitués puisque c’est un peu la même chose au Cambodge, dans une moindre mesure. Il y a un nombre hallucinant de motos qui circulent dans cette ville. C’est le moyen le plus pratique de se déplacer là-bas. Nous n’avons pas tenté le diable en louant une moto. Autant j’adore la moto, mais pas dans ces conditions. Je tiens à ce qu’on rentre sains et saufs de ce voyage. La quantité de véhicules qui circulent en permanence donne l’impression d’un spectacle parfaitement coordonné. Chaque moto sait où elle va. Chacun se frôle mais ne se percute pas. Des motos vont à gauche, d’autres à droite, puis vient un énorme bus et tout le monde s’écarte. De temps en temps, une voiture se joint à la danse. Je me suis posé à un carrefour pour filmer ce cortège. Chaque fois qu’on se plaint de la circulation chez nous, je repense à ces souvenirs.
Le problème d’Ho Chi Minh City est que c’est une grosse ville. Nous avons eu du mal à trouver des restaurants tellement la surface de la ville était grande. Ils étaient éloignés les uns des autres. C’était loin d’être pratique. Il y a des buildings, de la circulation, de la pollution. Il faisait chaud et lourd. J’avais l’impression d’être à Paris en pleine canicule. C’est bien quand on est dans un immeuble climatisé pour travailler mais pour faire son touriste et se balader, c’est tout de suite moins avantageux. Le passé colonial français se fait apparent. Nous avons croisé un « Café de la Poste », la cathédrale « Notre-Dame de Saigon », une rue avec « Paris » dans son nom, etc… Il existe une légende selon laquelle les Vietnamiens parlent encore français. Cependant, nous n’avons croisé que très rarement des personnes parlant notre langue dans ce pays. Certaines vieilles personnes bredouillent quelques mots. Nous avons croisé un vieillard dans une pagode qui a commencé à parler français. Il nous a fallu presqu’une minute pour comprendre qu’il nous parlait dans notre langue maternelle tellement son accent était prononcé. De plus, c’est tellement inhabituel qu’on pensait qu’il nous parlait en vietnamien ou une autre langue que nous ne connaissons pas. L’avantage des grosses villes comme Ho Chi Minh City, c’est que nous avons retrouvé certaines grandes chaînes de fast-food ou de cafés style Starbucks. Une valeur sûre quand on marche par 35°C et qu’ils proposent des frapuccinos ultra sucrés mais délicieux.
La ruée vers le nord
À ce point du voyage, nous avions parcouru une grande partie du Cambodge et effectué plusieurs étapes dans le Sud du Vietnam. Autrement dit, ça commençait à faire beaucoup pour nos organismes qui nous suppliaient de se reposer un peu. Les plages paradisiaques du centre du pays se profilent. La capitale administrative et sa fameuse baie se dessinent au loin. Cap vers le nord !